Dis l'avion qui passe c'est la guerre ?
Un jour.
Pourtant depuis ce vendredi 13, même ici où il ne s'est rien passé. Ces questions sont là, bien présentes. Nous savons, je l'ai souvent souligné que le traumatisme (encore lui) n'est pas forcément lié à un évènement vu réellement, vécu, dans sa chair, il peut être seulement entendu, suggéré... relayé par l'autre. Nous en avons hélas la preuve. La télévision, la radio, les médias n'ont cessé de relayer ces épouvantables tragédies, le mot "guerre" a été prononcé, à juste titre
Mais que représente ce mot, qu'est ce que veut dire ce mot pour un enfant vivant dans un pays où justement il n'y a pas de guerre...Du moins avec le visage, la représentation qu'on se fait de la guerre.La guerre !
Deux jours plus tôt cette même télévision nous montre la commémoration de cette Grande Guerre, les professeurs, instituteurs ont sensibilisés, expliqués aux écoliers ce qu'était 14-18. Des images de combats, des films des documentaires ont été diffusés.
C'est ça la guerre.
Et celle des films "tu sais les gens ils meurent, mais c'est pas pour de vrai, c'est des acteurs, ils ne sont pas morts" m'expliquent mes petits patients. Oui la mort, c'est quand on ne bouge plus, on ne respire plus, on ne parle plus, on ne revient plus... on est mort pour de vrai
'"mon grand père il est mort pour de vrai, je ne le reverrai plus". La mort c'est pas du cinéma, de la télévision un jeu "on joue à je te tue, tu es mort, et après c'est moi qui suis mort"...Vendredi 13 la mort n'a pas été un jeu. L'effraction dans le réel, dans la quiétude du réel à été terrible, terrifiante. L'impensable, l'impensé à eu lieu et a été mis en acte.
"L'avion qui passe dans le ciel c'est la guerre ?"
Alors oui, l'avion qui vole dans le ciel et survole la ville c'est la guerre... Peut-être ?
Comment dire autrement ? Comment dire les choses, c'est pour surveiller, protéger, car nous avons vécu, à Paris une tragédie et des gens sont morts... Vraiment morts, alors que ce n'était pas la guerre, mais une simple veille de week-end où les gens allaient boire un verre, diner, voir un match, entendre un concert. Des assassins ont déclaré la guerre à la joie de vivre, au bonheur, à la vie
Comment expliquer, dire cela à des enfants ?Comment dire l'horreur, la violence, la haine et le mal il n'y a pas de recettes, pas de mode d'emploi, chacun doit et peut trouver les mots justes pour expliquer et dire la vérité et le réel de ce qui a eu lieu ce vendredi 13. Le pire serait de ne rien dire ou pire de dire qu'il ne s'est rien passé.
Brigitte Dusch, psychanalyste historienne