Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

dimanche 2 janvier 2011

Mourir demain ?

Dimanche dernier lors de la rediffusion sur arte de l'émission consacrée à Romy Schneider, sa fille a évoqué le théatre, sa relation au théatre, sa manière de jouer, de donner au public... Elle l'exprimait intensément :

"Donner, tout,tout ce que j'ai en moi, sortir tout, comme si c'était le dernier jour, la dernière fois que je jouais", tout donner...
Comme si c'était la dernière fois, comme si il n'y aurait pas de prochaine fois. "

Cette fois là, serait l'ultime...
Alors je me suis demandée une fois encore si vivre "comme si on devait mourir demain" était possible, humainement possible...
La vie réelle....
Pas un rôle de théâtre, mais le rôle que nous jouons au quotidien. Mais jouons nous un rôle ?

"Il n'y aura pas de demain"

Bien sûr personne ne peut affirmer que demain il sera là, ni après demain, nul ne sait, mais heureusement, je crois, nul n'y pense, sauf, peut-être s'il est malade, mourant, si justement ses derniers jours, ses dernières heures lui sont comptées, lui sont contées...
Comme s'il devait alors vraiment mourir demain, car cette mort là s'inscrit dans le champ du possible, dans le champ du réel.

Donne t-il alors tout ? Le peut-il ? En a t-il la force, l'en vie alors que la vie lui manque, que la vie se compte en instants qui restent..
Le reste... Il y a une fin, un fin attendue, plus vite que prévue.
Nous sommes tous dans le temps qui reste, qui nous reste, une sorte de compte à rebours dont nous ne connaissons la fin.

Pourtant, paradoxalement nous n'y pensons pas, ou alors dans des circonstances particulières, nous vivons dans l'espoir, dans le demain, l'aprés demain. Nos projets sont à long termes, nous nous projetons dans l'avenir, nous voyons plus tard, nous préparons notre retraite, nos vacances, parlons sans crainte vraiment de l'année prochaine.
Nous n'imaginons pas vraiment que ....

Nous ne vivons pas le moment présent, nous ne vivons pas ou alors très difficilement l'ici et maintenant, car nous sommes tantôt dans le passé tantôt dans le futur, mais jamais là, à la fraction de seconde de l'acte que nous posons.
Nous ne pouvons faire comme si c'était la dernière fois, comme si cet acte posé, là, maintenant est, sera le dernier. Ce qui dans ce contexte pourrait poser de pertinentes questions et mettre une sacrée pagaille
Car si ce moment est le dernier ou du moins peut l'être, alors à quoi bon se soucier de ses conséquences ? Agissons sans retenue, et libérons nos pulsions, puisque c'est la dernière fois, vivons à fond...

Bien sûr Sarah Biasini n'a pas voulu dire cela, elle exprimait bien ce que ressentent les acteurs de théatre, qui jouent, certes, mais qui n'ont pas droit à l'erreur devant le parterre de spectateurs.. Ils ne peuvent rater la scène, elle ne pourra être rejouée, reprise, coupée au montage. C'est comme ça le théatre, une sorte de réalité qui n'en n'est pas une, un rôle à interpréter sans se tromper... Il faut en effet donner, offrir ce qu'on a, ce qu'on est de mieux, pour donner toute sa force, sa crédibilité au personnage, pour rendre ce personnage vivant, pour lui donner corps et âme devant la foule. C'est s'effacer pour se donner corps et âme à la foule..

Certains de mes patients, souffrant de troubles anxieux, de fortes angoisses et terriblement inhibés me disent "je n'ose pas, je pense toujours au pire, je vis dans cet espoir du pire, de la catastrophe, alors je me replis, je ne me lache pas, je ne m'autorise pas.."
Et quelque fois d'ajouter, "je me dis que je devrais vivre, parce que je pourrai mourir demain ou là tout de suite.. Et je n'aurai rien fait, je n'aurai vécu même pas à moitié, tout ça à cause de ma peur, de mes angoisses. Là comme ça, je me dis que je suis passé à côté de tout, j'ai des regrets et des remords...

Croyez vous que nous puissions vivre ce jour comme si c'était le dernier ?
Ceci est-il simplement imaginable, concevable ?
Ne pas imaginer, ne pas penser à demain...

Il y a quelques temps un patient m'avait posé la question de savoir si je savais ce que je ferai si je devais mourir demain, je mets à la fin de ce texte le lien de l'article rédigé alors..
Une question récurente, obsédante...
Vivre les moments comme s'ils étaient ultimes, pour se persuader de vivre intensément, de penser à l'ici et maintenant, de profiter, de s'approprier... Une expression, une vue de l'esprit, une jolie métaphore à ne pas prendre au pied de la lettre
Une phrase qui permet de permettre, d'oser, d'aller au delà...De sentir, d'éprouver...
Réprouvant la superficialité, la non prise de conscience de l'instant présent, tout en jouant sur l'inconscience d'un futur inexistant, voire impossible. Comme si demain ne serait pas, comme si nous ne serons pas demain.
Récurente, obsédante, inquiétante....
Pour vivre sans avoir trop de remords, de regrets, sans se tourner sur un passé encore, pour se dire, si j'avais su.... Hier, j'étais heureux et je ne le savais pas;.
C'est peut-être un peu ça ... Aussi ?

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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