Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

dimanche 27 avril 2008

Pourquoi la douleur ?

"Mais pourquoi j'ai mal ? Pourquoi cette douleur ? pourquoi je souffre ? "
Ces questions je les ai entendues souvent, je les entends encore, je me les pose aussi, quand je ne sais pas comment faire face à des douleurs rebelles. Face aux douleurs, aux plaintes du corps
Je n'ai pas de réponses !

"J'ai mal ! Pourquoi ? "
On peut expliquer d'où ça vient, pourquoi aussi en termes techniques. Il s'agit de la loi de cause à effet. Tout le processus de la douleur est maintenant connu en partie, on sait aussi un peu soulager, si peu !


Cela ne fait que peu de temps qu'on s'y interresse à soulager le mal, la douleur, celle qui fait si mal...Celle qui fait que le corps se manifeste, que le corps crie, que le corps hurle
Qu'il pousse des cris tellement fort qu'il n'en peut plus ni d'avoir mal ni de crier
Qu'il gémisse tellement longtemps qu'il n'en peut plus car ça lui fait mal depuis si longtemps et pendant si longtemps.
Quand le corps ne sait plus parler autrement, qu'il semble qu'il ait abandonné, relégué, oublié un autre langage, une autre langue que celle là


Soigner, apaiser, guérir le "avoir mal " ?
Nous ne sommes pas encore très au point pour ça d'ailleurs !
Cela fait peu de temps qu'on prend en compte la douleur de l'enfant et celle du nourrisson... Sensé encore, il y a quelques décennies ne pas ressentir la douleur.

J'ai vu et entendu bien des médecins expliquer à leur patient le mécanisme induisant leurs souffrances physiques, et , navrés leur dire qu'ils faisaient du mieux qu'ils pouvaient pour soulager. Ce qui était vrai.

Mais la question, la véritable question, celle qui taraude ceux qui ont mal, au fond d'eux même, ce n'est pas vraiment de savoir quelle est la cause mécanique de ce qui leur douleur,(le savoir n'apaise pas la douleur) mais de savoir pour quoi ?
Et c'est ce Pour Quoi ?
Pour quelle chose ?
Et quelle est cette chose ?
Cette chose qui fait que j'ai mal ?
La maladie oui, sans aucun doute ! Le traumatisme oui, certainement !
la cause physiologique n'est pas niée. Non elle explique, une cause qui produit un effet.
Mais la question, l'interrogation véritable se situe au delà et donne justement naissance à une réflexion plus intense, plus complexe, plus intime.
Plus intime, car plus profonde, comme si la réponse ou un élèment d'un semblant de celle ci pouvait se loger en nous, se lover dans un creux de nous, dans une faille, un petit vide qu'on aurait pas comblé. Et qu'on ne pourrait combler
Alors se met en place le long monologue...Un monologue intérieur. Une foule de pensées, parasites, automatiques. Ca n'arrête plus !

Mais qu'ais je fait ?
Pourquoi moi ? Que faut-il faire pour que ça cesse ?
Comme s'il s'agissait d'une malediction, d'u mauvais sort jeté, d'une punition divine ou pas.
mais dans tous les cas, cette douleur affligeante a une cause plus ou moins magique. Comme s'il fallait par là, payer une dette. Mais une dette dont on ne connait pas vraiment l'origine, ou alors celle ci se perd dans la nuit des temps !
Une dette qui ne se réglera peut-être même jamais.
Cette douleur là ne céde pas... Elle résiste aux traitements, à tous les antalgiques !
Elle résiste à tout !
On la traine alors comme un fardeau, un boulet qui devient chaque jour un peu plus lourd !

Mais cette douleur nous l'avons fait nôtre. Sans même sans apercevoir, sans s'en rendre compte, malgré notre volonté. Elle s'est installée, comme une tension musculaire qui chaque jour gagne du terrain et réduit notre mobilité.
Elle a pris possession de notre corps, l'a envahie, intrusé, elle s'est faite lui.
Corps étranger, c'est une lutte sans merci qu'elle livre avec ce corps intime. Pour le déposseder de son essence, et prendre possession, s'installer au sein de cette enveloppe.
Le corps et la douleur, la douleur et le corps
Une histoire d'amour qui finit mal, mais qui n'est pas non plus une histoire de haine
Une histoire tout court, un rendez vous malsain, toxique, un rendez vous avec un hôte pervers, qui s'installe sans prévenir, et qui ne s'en va pas. Qui se trouve bien là, et dont on ne peut plus se défaire
Et c'est là, à cet instant, à ce point que tout ce joue !
Que se joue la relation perverse avec la douleur et la souffrance qu'elle génére
Jamais je n'ai entendu de mots aussi guerrier pour en parler, les patients engagent une véritable lutte, un combat sans merci, parfois à mort
Un combat où les forces peuvent paraitre inégales, mais nous savons tous, que sur les champs de bataille rien n'est jamais joué d'avance
On lutte, on use de stratégie, de stratégème, on la soudoie, on la calme, on l'endort, on la drogue, on la caresse, on discute, on négocie, on promet, on lutte encore, puis on baisse les bras, si on n'en sort pas vainqueur.
Elle met KO, et parfois on ne se reléve pas. Mais au bout de combien de rounds ?

La douleur fait souffrir, fatigue, lasse, tue !

Mais le "J'ai mal". Signifie t-il que nous nous sommes approprié celle ci ? qu'Elle est nôtre à présent. Le je a mal...
On aimerait dans ce cas, vraiment que Je soit un autre.
Qu'est ce qui a mal ? Qui souffre ?
Je ? Mais ce je là qui est-ce ? Est-ce bien moi, ce je qui a mal ?
Qui suis-je moi qui ai mal ?
Je ne suis qu'un alors moi et la douleur ?

Mais c'est mon corps qui a mal, c'est lui qui souffre, qui ressent la douleur
Mon corps est alors ce Je ?
Je est une somme : Celle du corps et de l'âme. Mais aussi de l'esprit
Pour être plus pragmatique, nous dirons que nous sommes fait d'un corps, d'une enveloppe corporelle, et aussi d'un cerveau. Qui fait partie du corps lui aussi, mais qui en régle le fonctionnement !
La douleur est-elle le parfait exemple de la réunion de tous ces élèments ?
J'ai mal, je souffre.. En est-il l'indicateur ?
Faut-il le croire ? Le faire croire ? Le laisser croire ?

La douleur rappelle que le corps est bien là, qu'il nous enveloppe, mais il ne fait pas que nous protéger. Indicateur que quelque chose se passe la douleur est un symptôme, qui mise bout à bout avec d'autres signes cliniques constituera un syndrôme. Organique.
Mais le psychisme. Que fait-il de ce mal ? De cette souffrance du corps ? Cette souffrance qui n'est pas création de l'esprit. Elle est bien réelle, et n'est pas uniquement l'expression d'un mal de l'âme.
Et encore que : "J'ai mal à mon âme, et pour le dire, je ne peux que dire j'ai mal à mon corps"
C'est déjà pas mal ? On dit quelque chose au moins !
On s'adresse à l'autre "ça va pas, j'ai mal là"
Sous entendant peut-être "je suis là, j'existe, tu me vois, tu m'entends"

A quelle négociation sommes nous alors parvenu ? Comment pouvons nous extirper cet hôte indésirable, qui tue peu à peu tout désir, jusqu'à celui de désirer, mais qui est désirant par dessus tout ?
Exorciser ! Sortir dehors !
Chamanisme ? Cannibalisme ?
La douleur incorporée au corps est de trop, elle est trop, elle est en trop et nous n'en voulons pas, pourtant elle est là,
Apprendre à vivre avec ? Certains patients me disent que c'est possible, qu'ils n'ont pas d'autres choix ?
En lien alors avec le "tu dois souffrir"
Sotte injonction dont on se croit devoir être fidéle
Une douleur rédemptrice nous offrant un billet d'entrée au Paradis
Sommes nous ou désirons nous donc tant à être des VIP ?
Quel est le prix à payer ?
Sommes nous alors décidé à mettre ce prix fort ?
Ou sommes nous enfin prêt à franchir le pas, à s'affranchir du pas, et ne rien devoir, ne pas y voir de prix, d'honneur ni d'excellence et à refuser de souffrir pour avoir enfin le droit de vivre ?
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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
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Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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