Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

mardi 29 janvier 2008

écriture de soi et psychanalyse

Plusieurs patients me posent la question :
"écrire sur soi est -il une psychanalyse"?
Si je confie, si je parle à un journal, à un blog, est-ce une psychanalyse ? Est-ce que ça fait comme une psychanalyse

Cette question peut paraitre curieuse au demeurant, mais qui mérite qu'on s'y arrete.
C'est le sujet qui fait d'un autre sujet son psychanalyste
C'est le sujet qui fait de lui même un analysant, l'analysant qu'il devient dans sa relation à celui qui est supposé savoir.
Celui auquel il s'adresse et qu'il fait ainsi son analyste.
Celui qu'il a choisi pour ça.
Celui à qui il va parler.

Alors que vient faire l'écrit dans cette relation là, puisque la cure, l'analyse, repose sur la parole ou le silence..
Que vient faire l'écrit tout court..

L'analyse, la thérapie repose sur l'échange, sur la relation entre deux sujets.
Elle repose sur la parole.. En principe la parole dite.

L'analyse repose aussi et surtout sur le transfert
Il faut bien qu'il se passe quelque chose entre l'analysant et l'analyste pour qu'il y ait analyse
Il faut bien aussi qu'il y ait analysant et analyste.

Pas d'analyse si ces conditions ne sont pas là.
Où alors une auto-analyse
Se psychanalyser soi même ?

Mais où est le transfert ?
Ce ne peut-être une analyse dans ce cas là.
Un introspection.
Un examen de conscience.

Bon nombre de personnes rédigeaient dans les siècles passés leur "intérieur" à la demande de leur directeur de conscience, ou seulement parce qu'elles en éprouvaient le besoin

Alors l'écriture dont les patients parlent, cette écriture là, si présente dans leur discours, qui apparait souvent libératrice, thérapeutique, prend tout son sens quand elle est destinée à leur thérapeute, ou leur analyste.

Ainsi nombre de mes patients ont recours à l'écriture, "C'est plus facile comme ça"
Ecriture pour soi, de soi, sur soi.
Parfois pour ne rien dire, seulement parce que ça soulage, ça fait du bien, ça vide....

Ecriture adressée au thérapeute, pour lui, à son intention.
Ecrits avant la séance, pour la séance...

Des feuilles de cahier, manuscrites, plus rarement tapées à la machine

-"C'est pour vous"

Petits bouts de papiers froissés, glissés, donnés à la dérobée à la fin de l'entretien..

Toujours à la fin

C'est toujours là qu'il se passe quelque chose. A la fin
Cette angoisse de la fin, de partir, de finir, d'oublier peut-être

Mais c'est souvent à la fin que l'essentiel se joue

A la fin

Quand c'est fini, quand le temps imparti est terminé

Quand je le raccompagne
Il a là quelque chose à dire

qu'il ne pouvait pas dire,

qu'il laisse échapper là... au coin de la porte,

ou qu'il glisse dans la main, qu'il tend..

Alors que faire de cette écriture là ?

Nudité choquante ?

La nudité est elle choquante ?

C'est le questionnement suite à la lecture d'un article paru dans Libé qui m'inspire ces réflexions.

Il s'intitule l"a nudité choquante" ou quelque chose comme ça, peu importe le vrai titre, mais importe ce que j'en retiens.

Choquante ? la Nudité ?

Non, ce n'est pas que la nudité me choque,
la nudité que je trouve choquante.
Mais l'usage qu'on en fait.
L'instrumentalisation, l'ustensilisation qui en est faite.
De ça sûrement....On peut être choqué

Eprouver un choc à regarder, pas seulement le corps, nu, mais le corps nu, exposé, étalé, donné à voir au regard des passants, des spectateurs, des lecteurs.

Encore faut-il savoir comment ce corps est regardé ? et s' il l'est vraiment.

Il s'agit dans ce cas là, du corps, objet donné à voir, à l'autre, au désir de l'autre, peut-être sans désir, mais seulement avec envie, pour en susciter l'envie.

Corps objet, corps jouet, corps joué, corps floué, corps inanimé étalé sur papier glacé.
En noir et blanc, en couleurs...Le corps est montré, dans tous ses états,
Sans desssus, dessous,
Sans dessus du tout,Nu ou simplement un rien vétu
Mais donné à voir selon
Montré à voir
Imposé à voir !

C'est presque une injonction "voyez ce corps montré, dans tous ses états, vétu, dévétu, nu, dénudé, peu habillé Regardez ! "

Homme ou femme objet : Il n'y a plus de sujets, mais des objets.

Objets de publicité, support publicitaire, pour attirer le regard, produit pour vendre des produits.
Sur les affiches, les écrans de nos téléviseurs, on voit des corps partout, sans visage et sans âme, des corps qui attirent et attisent le regard.

C'est peut-être là, qu'est le choc, pas celui des mots, souvent il n'y en a pas, ou si peu.
Ils disparaissent derrière l'image.
Il ne faut pas que l'oeil du passant ou du spectateur -voyeur- soit distrait, accroché par autre chose que ce corps là.

Ce corps qui fait vendre. Ce corps vendeur.
Devant être parfait, il se montre, s'exhibe et s'esquive sous les regards, sous les lumières, sous les caméras.

Il danse vétu, peu vétu, laissant deviner ce qui n'est pas montré, ou montré un peu.

Il bouge, lentement, langoureusement, au rythme d'une musique ou plutôt de bruits et de sons incompréhensibles masquant des mots devenus inaudibles.

Masquant... masque, illusion, sans magie.... spectacle triste oh combien !

Il bouche et se déhanche tant qu'il en devient vulgaire, trivial, pornographique quelque fois.

Car il n'est pas à sa place.
Du moins comme ça, là.
Il semble n'y avoir que le corps, un corps spectateur, mais de quoi ?
Spectateur de ceux qui le regardent ou le regarderont, le verront, le jugeront, le jaugeront.

Soumis au regard, il l'est alors à la critique, au jugement, aux remarques souvent désobligeantes, aux moqueries, aux sarcasmes, aux insultes. Mais il reste là.

Inerte, inamovible parfois couvert de graffitis, déchiré, écorché...

Il n'est pas acteur.
Seulement, un corps animé sans âme, qui ne ressemble à personne, anonyme, sans identité.

Une misérable marionnette, un pantin désarticulé dont les ficelles semblent cassées

Cassé ! Ce corps semble en effet brisé, clivé, coupé.
Non seulement de la réalité, du contexte
Mais aussi de son identité.

Appartient-il à quelqu'un ?
Est-il l'objet d'un sujet ?
Par quel cordon ombilical lui est-il relié ?

Qui se le demande ?
Il semble aussi qu'on ne se soucie pas de savoir à qui il est.
De savoir si quelqu'un se cache derrière ce corps parfait avant de se demande qui sait -c'est- ?
De se persuader
Que derrière ce corps photographié, il y a un sujet.
Que derrière ce corps exposé se dissimule un sujet, l'objet sur le sujet, le sujet de l'objet.

C'est ça, sûrement qui est choquant, et pas la nudité, par le corps nu, mais ce qui en est fait.
Le corps usé, usité, utilisé, instrumentalisé, ustensilisé, exposé, montré, donné à être regardé, comme ça, là !


On peut aussi aborder la question autrement, par un autre biais et se demander qui est ce sujet qui offre son corps objet ?

Ce corps n'est pas volé !

Ce corps est celui d'un sujet consentant à être exposé, à être instrumentalisé, ustensilisé etc..

Quid alors de ce sujet ?
De ce sujet qui se veut objet ? du moins le temps d'une photo ? D'une prise de vue ? D'un arrêt sur image ?

Mais ce temps, ce mi-temps, ce long-temps ? quelle valeur à t-il pour ce sujet justement.

Le temps de la photo, de la prise de vue, et/ou de l'exposition, de la photo ?

Le temps du "donné à voir"
Clivage du sujet/objet ? ne donnant à voir que l'image du corps, et non le corps ?
L'ombre du corps, qui disparait avec l'image, avec le flash du photographe ?

Que devient alors ce corps, décorporé et incorporé à travers le prisme de l'outil qui le reproduira et le projetera sur la matière papier ?

Corps papier ? Corps impalpable, corps emprisonné dans la pellicule, corps figé qui ne peut plus bouger ?

Fixé pour une partie de l'éternité ?
Cela lui confére t-il un peu d'immortalité ?

Est-ce ce même corps ? Ce même corps qui posait, exposé, pour être exposé dans une galerie, un hall de gare, une page de magazine....?

Appartient-il au même sujet qui s'est laissé photographié ? exposé ?

Voleur d'images ?

Ou bien le corps n'est destiné et seulement dans ce cas précis à n'être qu'un objet.

Sujet consentant ? Corps réduit à une "force de travail" louée contre un salaire, de l'argent ?Corps marchandise, corps marchand, corps marchant ?

Liberté ? Libéralisation ? Féminité ? Féminisme ?

Corps marchandé et marchandise, objet, instrumentalisé dans une société capitaliste où tout s'achéte et tout se vend.

Tout, corps et âme ?
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Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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