Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

samedi 18 octobre 2008

Le boulevard périphérique

Cela fait plusieurs années que je lis les ouvrages d'Henri Bauchau, et que je les relis toujours avec autant de plaisir, de bonheur et d'émotion..

Je viens de terminer son dernier roman, le boulevard périphèrique. On ne sort pas indemne ce cette lecture !
Des les premières pages on se trouve immergé au coeur de l'univers du narrateur, son quotidien, ses allers et retour vers l'hôpital, où il visite sa belle fille souffrant d'un cancer, d'une récidive de cancer...Elle se bat. Il est le témoin de cette lutte, il regarde, spectateur impuissant...Il raconte, nous raconte, se raconte. Il dit, comme toujours, avec les mots juste, cette impuissance là, ce combat pour la vie, ce combat contre la mort.

Puis il se souvient, il pense tout au long de ce chemin, si long, si douloureux aussi, pas facile, pas simple. Une sorte de monologue intérieur, un monologue dialogue avec le lecteur, qui devient témoin, qui devient l'oreille, qui écoute, qui entend les mots lachés sur le papier...
Il décrit, le quotidien, ce quotidien là, le chemin, les visites....L'hôpital
L'univers de l'hôpital est dur, la maladie est dure ! Dure pour les patients, mais aussi et surtout pour les proches, moins armés peut-être pour faire face à la maladie, à la souffrance, à la déchéance des corps, à l'approche, à l'odeur de la mort...Au combat de celui ou celle, gisant sur un lit, se raccrochant à un espoir, à un projet, à un lendemain, à un futur.... Un possible, une autre alternative, une sorte d'autre fin, qui même si elle n'a pas l'apparence de la happy end, serait ou sera peut-être mieux que l'ultime... La fin, la fin du film !

Ce monologue, c'est une sorte d'accroche, d'escalade, d'ascension vers le sommet, un sommet, à ce quelque chose qui permet qu'on ne se retrouve pas forcèment face au vide, à l'angoisse de la pensée, de l'ultime, de la possibilité de la fin...

Alors il pense ! Son esprit chemine dans sa vie, sa vie à lui, il y a longtemps, des années en arrière, alors qu'il était jeune, et que c'était la guerre....Il pense à cet homme, à cet ami de jeunesse, avec qui il a partagé des moments, intenses !
Entre les deux hommes c'est une histoire d'escalade ! Il l'admire, il admire sa précision, son ....
Puis la guerre, la Résistance...La mort de cet ami, une mort dont il ne sait finalement pas grand chose

Présent et passé, se croisent, se rencontrent, s'éloignent, le présent permet de comprendre le passé, la mort, le passé éclaire le présent...

La mort, car de la mort il est question ici, tout au long de ces pages, de cette histoire terrible, au présent et au passé, de cette mort présente, à chaque page, à chaque instant...

La mort et la réalite de la vie, la maladie et son cortège de douleur, de questions, d'hypothèse, d'espoir et de desespoir. Les visites quasi quotidienne de son domicile à l'hôpital, vers cette chambre dernier domicile de sa belle fille, théatre de la vie, des proches, qui parlent qui décident de ce que devrait, devra être demain....On élabore, on parle, on pleure, on se remet..On rêve, on se dispute...Bien ordinaire, un quotidien que je rencontre souvent, lors de mes visites, de mes entretiens avec les patients, leur famille....
Une sorte de chronique de la misère ordinaire, dans ce lieu inhumain !

Et ces quotidiens trajets sur le boulevard périphèrique encombré, les heures de pointes à éviter. Les trajets en RER... La lecture qui accompagne, qui alterne avec les pensées, de la guerre, de la résistance...
Les visites à la belle fille malade, aujourd'hui, les visites à la prison, après la guerre pour rencontre le colonel nazi, dernier témoin des derniers instants de son ami !

Bouleversante histoire d'amour et d'amitié, mais l'amitié est peut-être de l'amour !

Henri Bauchau une fois encore a su dire avec des mots ordinaires et simples l'anxiété des proches, l'espoir des malades, le quotidien des soignants...

C'est aussi l'histoire de la peur, du dépassement de la peur, de la grandeur de l'âme, de l'esprit de l'homme qui a su transcender sa propre peur, qui a pu l'affronter pour vivre son destin...

Croisé et croisement d'un chapitre à l'autre, d'un paragraphe à l'autre, d'une ligne à l'autre, le temps n'existe pas, n'existe plus, tels ces souvenirs qui s'inscrivent et s'invitent au présent....

Merveilleux moments que de lire un tel roman. Que monsieur Bauchau en soit remercié lui qui a si souvent accompagné mes trajets en RER.... de chez moi, à l'hôpital...Où la mort parfois m'était insupportable....Si souvent insupportable, mais comment peut elle être autrement ?


Oedipe et Antigone ont été mes compagnons de route, dans le RER...Je les ai lu et relus, souvent, y puisant à chaque fois, un peu de force, un peu de vie, et surtout un enseignement fort riche

Henri Bauchau Le boulevard périphérique, Acte sud, janvier 2008
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